Une Lettre Pour Noël
Au cœur du sud du Bénin, dans le vibrant village de Yokpo Ahonsedja, où les rues s’animent dès les premières lueurs de l’aube, les maisons en terre cuite se dressent fièrement sous le soleil ardent, leurs façades vibrantes de couleurs chaudes. Les rires joyeux des enfants résonnent gaiement dans les ruelles étroites, tandis que les parfums envoûtants des plats cuisinés pour les festivités de Noël emplissent l’air. C’est donc dans ce décor pittoresque que vivait un enfant de 10 ans nommé Dossou. Né d’une relation adultérine, sa venue au monde fut entachée de scandale et de chuchotements dans la communauté. À cause de cette situation particulière, il vécut initialement avec sa mère, loin de son père. Ce n’est qu’après le décès de sa mère qu’il rejoignit la maison de son père, où il dut cohabiter avec sa belle-mère et ses sœurs.
La belle-mère, Adjoa, avait elle-même été élevée dans un environnement difficile, où la rivalité et la compétition étaient monnaie courante. Issue d’une famille où les garçons étaient favorisés, elle avait dû lutter pour se faire une place et gagner le respect de ses proches. Ces expériences passées avaient laissé des cicatrices profondes, alimentant sa méfiance envers Dossou et son besoin constant de prouver sa propre valeur. Son mariage avec le père de Dossou représentait pour elle une chance de sécurité et de statut social, mais l’arrivée de l’enfant illégitime menaçait cet équilibre fragile, réveillant en elle des peurs profondément enracinées et des instincts de protection vis-à-vis de ses propres enfants.
Quant au père, nommé Tadagbé, il avait lui aussi ses propres démons à affronter. Élevé dans une société traditionnelle où les normes et les attentes étaient rigides, il avait appris dès son plus jeune âge à réprimer ses émotions et à suivre le chemin tracé par ses ancêtres. Son mariage avec Adjoa était le fruit d’un compromis social, plutôt qu’une union fondée sur l’amour et la compréhension mutuelle. Prisonnier des attentes de sa communauté et de sa propre peur de l’échec.
Dossou était le cadet et en même temps le seul garçon de la famille, une position qui attisait la jalousie de sa belle-mère. Incapable de donner au père de Dossou des enfants mâles, elle reporta sa frustration sur lui, le considérant comme un rappel constant de son échec. Sa haine envers Dossou était alimentée à la fois par l’infidélité de son mari et par sa propre incapacité à lui donner un fils. Chaque jour, Dossou endurait les insultes et les mauvais traitements, sa douce voix étouffée par la jalousie et la méchanceté de sa belle-mère. Malgré ses efforts pour gagner son affection, il ne recevait que mépris et hostilité en retour.
Alors qu’il endurait les cruautés de sa belle-mère, Dossou se raccrochait désespérément aux souvenirs doux et réconfortants de sa mère bien-aimée. Des flashbacks surgissaient souvent dans son esprit, comme des éclats de lumière dans l’obscurité de sa vie quotidienne. Il se souvenait de sa mère lui chantant des berceuses douces pour l’endormir, de ses caresses réconfortantes lorsqu’il se sentait triste ou effrayé, de ses mots d’encouragement lorsqu’il avait besoin de force. Ces souvenirs étaient comme des bouées de sauvetage dans un océan de désespoir, lui rappelant qu’il avait été aimé et chéri, même si sa mère n’était plus là physiquement.
Le père, conscient de la naissance de Dossou issue d’une infidélité, regardait d’un œil passif les traitements injustes infligés à son fils. Un sentiment de culpabilité l’habitait, mais il se sentait impuissant à changer les choses, enchaîné par les conventions sociales et familiales. Chaque regard vers Dossou ravivait sa douleur intérieure, mais il se trouvait dans un dilemme déchirant entre son amour pour son fils et les attentes sociales pesantes. Il espérait ainsi éviter les conflits et maintenir l’illusion d’harmonie dans sa famille.
La veille de Noël, l'excitation emplissait l'air alors que les enfants du village se préparaient pour les festivités à venir. Dossou, avec ses sœurs, décida de s'amuser et de participer à la préparation de la fête. Mais au cours des jeux innocents de l'après-midi, un drame imprévu survint.
Alors qu'ils étaient absorbés par leurs jeux, l'un des enfants renversa accidentellement du jus de bissap sur le vieux canapé que leur père avait remis au matelassier du village pour le restaurer spécialement pour la fête. Une tâche pourpre se répandit sur le tissu fatigué, laissant une marque indélébile sur la précieuse création de leur père.
Lorsqu'elle vit le canapé taché, Adjoa chercha instinctivement un coupable, et ses yeux se posèrent sur Dossou, toujours à proximité avec ses sœurs. Sans écouter les explications de l'enfant, elle l'accusa d'avoir intentionnellement causé l'incident pour gâcher la fête. C'était la goutte d'eau qui fit déborder le vase de son mépris pour lui.
Lassée de le frapper à chaque fois pour les moindres fautes, la marâtre décida de le punir d’une manière nouvelle ce jour-là. Dossou devrait passer la nuit dans l’enclos à cochons, un endroit sombre et inhospitalier qui résonnait des grognements et des odeurs repoussantes des animaux.
Dossou, terrifié par cette perspective, tenta en vain de plaider sa cause. Ses sœurs, qui étaient témoins de la scène, baissaient la tête, impuissantes devant la cruauté de leur mère. Le père, absent comme toujours, n’était pas là pour protéger son fils des abus de sa marâtre.
Conduit par la force jusqu’à l’enclos, Dossou tremblait de peur alors que la nuit tombait lentement sur le village, enveloppant Yokpo Ahonsedja dans un manteau d’obscurité. Seul dans l’obscurité, il ressentait le regard accusateur des animaux autour de lui, ajoutant à son anxiété croissante. Sous le ciel étoilé, il se sentait comme un étranger dans sa propre famille, un intrus dont la seule présence était tolérée par politesse sociale.
Dans l’obscurité oppressante de l’enclos à cochons, Dossou tremblait de peur alors que sa belle-mère s’approchait de lui, le visage dur et les yeux étincelants de méchanceté.
« Tu pensais pouvoir échapper à ta punition cette fois-ci, hein ? » cracha-t-elle, sa voix emplie de venin.
« Tu paieras pour ton insolence, petit bâtard ! »
Dossou, cherchant désespérément un peu de réconfort, osa appeler sa marâtre « maman », mais sa voix tremblante fut immédiatement réprimée.
« Ne m’appelle jamais ainsi ! » rugit-elle.
« Ta mère était une catin, et tu es le fruit de son péché. Tu n’as aucun droit de me considérer comme ta mère ! »
Les sœurs de Dossou, témoins de la scène, s’interposèrent, tentant de calmer leur mère.
« Maman, s’il te plaît, arrête ! » supplièrent-elles.
La marâtre les repoussa avec mépris. « Vous ne comprenez rien. Ce garçon est une malédiction pour notre famille. »
Alors qu’elle levait la main pour le frapper, les sœurs de Dossou s’interposèrent courageusement, formant un rempart protecteur autour de leur frère. « Arrêtez ! » crièrent-elles d’une seule voix. « Vous ne pouvez pas continuer à le traiter ainsi. Il est notre frère, et il mérite d’être aimé et respecté. »
Adjoa rentrait furieuse dans la maison, Dossou se retrouva seul dans l’enclos, plongé dans l’obscurité grandissante de la nuit. Le froid mordant de l’Harmattan s’insinuait dans ses os, lui arrachant des frissons de désespoir. Les ténèbres semblaient se refermer autour de lui, épaisses et étouffantes, et le silence de la nuit était rompu seulement par les grognements lointains des cochons.
Tremblant de froid et de peur, Dossou se blottit contre lui-même, cherchant en vain un peu de chaleur dans ce monde de glace. Les heures passaient lentement, chaque minute semblant être une éternité dans ce cauchemar glacial.
À mesure que la nuit s’approfondissait, le froid devenait plus intense, transformant l’enclos en un royaume de gel et de désolation. Dossou sentait la morsure du froid dans ses membres engourdis, ses dents claquant de plus en plus fort avec chaque rafale de vent glacial.
Il commence à ressentir les premiers signes d’hypothermie : des frissons violents, une confusion mentale et une respiration lente et superficielle. Paniqué et en proie à la douleur, il appelle à l’aide à plusieurs reprises, espérant que quelqu’un vienne à son secours.
Seul dans l’obscurité, Dossou lutta pour rester conscient, son esprit tourmenté par la douleur et la peur. Il appelait à l’aide à plusieurs reprises.
« S’il vous plaît, quelqu’un, aidez-moi ! » gémit-il, sa voix brisée par les larmes et la morve coulant de son nez rougi par le froid.
« Apportez-moi une couverture … »
Ses cris de détresse se mêlent aux grognements des cochons qui peuplent l’enclos, leurs bruits assourdissants étouffant les appels désespérés de Dossou.
Ses cris désespérés tombent dans le vide de la nuit.
Dans la douleur glaciale de la nuit de l’Harmattan, alors que Dossou lutte pour rester conscient, ses pensées se tournent vers sa mère bien-aimée. C’était son premier Noël sans elle, et la douleur de son absence se mêle à la souffrance physique du froid qui le transperce. Se rappelant les paroles réconfortantes de sa mère, qui lui avaient enseigné que chaque veille de Noël était magique, Dossou ressent un désir ardent de communiquer avec le Père Noël, même dans cette nuit sombre et solitaire.
Parmi les outils de travail et les équipements agricoles qui jonchaient le sol, ses yeux se posèrent sur un objet qui se démarquait : un vieux stylo presque oublié, partiellement caché sous une pile de papiers froissés. Avec précaution, il s’approcha, écartant les obstacles qui se dressaient sur son chemin. Quand il saisit enfin le stylo, une vague de soulagement l’envahit. Son cœur battait la chamade alors qu’il contemplait l’objet avec émerveillement, réalisant que c’était la clé pour donner vie à son idée. À ses pieds, il trouva également une feuille de papier abandonnée, témoin muet des nombreuses batailles menées par le vent.
Rassemblant ses trésors dans ses mains tremblantes, Dossou sentit un mélange d’émotions l’envahir. La tristesse de son cœur brisé se mêlait à un frisson d’espoir naissant. Dans cet enclos austère, où le monde extérieur semblait lointain et inaccessible, il se sentait pourtant connecté à quelque chose de plus grand, de plus mystérieux. Avec un soupir profond, il s’agenouilla sur le sol froid et commença à écrire, laissant les mots couler de sa plume comme des larmes sur le papier.
"Doux Père Noël," écrit-il d'une main tremblante, "je ne demande pas de cadeaux cette année. Je sais que ma demande est insolite, mais je ne peux plus supporter cette vie.Ma belle-mère est cruelle, me bat et m’insulte. Mon père est indifférent. Ma mère me manque. Je ne veux plus vivre dans cette souffrance. Je ne suis même pas dans la maison, mais dans l’enclos, sans couverture ni natte. Le froid m’envahit et je dors à même le sol comme un animal. Chaque nuit, la douleur me submerge. Je n’ai plus personne sur qui compter. S’il te plaît, ôte-moi la vie, emmène-moi retrouver ma mère. La mort serait le plus beau des cadeaux.
Les mots se brouillent sous les larmes de Dossou alors qu’il signe la lettre d’un geste fébrile. Une fois terminée, il la serre contre son cœur, comme s’il confiait son destin au Père Noël lui-même. Puis, avec un soupir mélancolique, il la cache sous un morceau de tissu dans un coin sombre de l’enclos, espérant que ses prières trouveront écho dans le cœur généreux du vieil homme à la barbe blanche.
Après avoir écrit sa lettre déchirante au Père Noël, Dossou, épuisé par la douleur et le froid, se laisse finalement glisser dans un sommeil frémissant. Dans les bras de Morphée, il est transporté vers un monde où le froid ne peut l’atteindre, où les étoiles brillent plus lumineusement et où sa mère bien-aimée l’attend.
Dans son rêve, il se trouve aux côtés de sa mère, entouré de chaleur et de réconfort. Sa mère lui sourit tendrement et lui caresse les cheveux, lui murmure des mots doux et apaisants. Ensemble, ils marchent main dans la main à travers un paysage paisible, loin de la souffrance et de la misère de ce monde.
Alors que le sommeil de Dossou s’approfondit, il se sent enveloppé par l’amour maternel, ses peurs et ses douleurs s’apaisent, et il sait qu’il est en sécurité dans les bras de sa mère pour l’éternité. Et dans ce rêve doux et réconfortant, Dossou s’éloigne lentement de ce monde cruel et injuste, emporté par l’amour infini de sa mère vers un au-delà de paix et de lumière.
Le lendemain matin, alors que les premiers rayons du soleil commencent à éclairer le village, Tadagbé, le père de Dossou rentre chez lui, le cœur léger et les bras chargés de cadeaux pour ses enfants. Il est plein d’excitation à l’idée de leur faire la surprise et de les voir sourire de joie.
Mais à mesure qu’il entre dans la maison, il remarque immédiatement l’absence de Dossou dans sa chambre. Son cœur se serre d’appréhension alors qu’il appelle le nom de son fils, mais aucun écho ne lui répond. Il fouille chaque recoin de la maison, cherchant frénétiquement dans l’espoir de le trouver caché quelque part, mais en vain.
Puis,son regard est soudainement attiré par une silhouette sombre dans l’enclos à cochons, et un frisson de terreur parcourt son échine alors qu’il reconnaît la forme humaine allongée sur le sol. Il se précipite vers l’enclos, le cœur battant la chamade, et là, il découvre avec horreur le corps inerte de son fils bien-aimé, étendu sur le sol gelé, immobile et recouvert de poussière.
Un cri de désespoir s’échappe de la gorge du père alors qu’il tombe à genoux aux côtés de Dossou, les mains tremblantes se posant sur son corps inerte. Il sent la froideur de la peau de son fils et réalise avec horreur qu’il est trop tard, bien trop tard.
Les cadeaux qu’il avait apportés pour ses enfants tombent négligemment à ses côtés, oubliés dans sa douleur déchirante. Il enlace le corps de son fils dans un étreinte désespérée, les larmes coulant sur son visage alors qu’il murmure des mots d’amour et de désespoir à l’oreille de Dossou.
A genoux aux côtés de son fils, son regard errant remarque un papier froissé près de la main de Dossou. Il le ramasse avec précaution, les mains tremblantes, et réalise avec une douleur indescriptible ce que c’est : c’est la lettre que Dossou a écrite au Père Noël la veille.
Le cœur du père se serre en reconnaissant l’écriture enfantine de son fils bien-aimé. Il déplie le papier avec précaution, les larmes embrouillant sa vision alors qu’il lit les mots déchirants que Dossou a laissés derrière lui. Ses mains tremblent encore plus alors qu’il prend conscience de la détresse et de la douleur de son fils, exprimées dans chaque mot griffonné sur le papier froissé.
Dans un tourbillon d’émotions, le père serre la lettre contre sa poitrine, sentant le poids insupportable de la culpabilité et du chagrin peser sur ses épaules. Il sait qu’il aurait dû être là pour protéger son fils, pour lui offrir l’amour et le soutien dont il avait désespérément besoin
Les larmes coulèrent sur son visage alors qu'il prenait dans ses bras le corps froid de Dossou, regrettant amèrement son absence de vigilance et de protection.
Tadagbé se redresse avec détermination, le visage marqué par la douleur et la colère mêlées. Il n’arrive pas à comprendre pourquoi son fils bien-aimé se trouvait dans l’enclos aux animaux, exposé aux éléments et aux dangers qui y résident. Avec chaque pas, son cœur bat plus fort dans sa poitrine, alimenté par un mélange d’angoisse et de détermination.
Il entre dans la maison avec une fermeté nouvelle, son regard cherchant sa femme du regard. Lorsqu’il la voit, il sent la colère bouillonner en lui, mais il se force à garder son calme.
Dans un silence tendu, le père fit face à la marâtre, son regard chargé de fureur contenue et de douleur palpable. Chaque seconde semblait s’étirer dans l’attente haletante de ce qui allait suivre. Les respirations étaient suspendues, les cœurs battant la chamade dans la pièce chargée d’électricité.
« Pourquoi ? » chuchota le père, sa voix résonnant comme un grondement sourd dans l’air étouffant. Ses yeux brûlaient d’une intensité glaciale alors qu’il fixait la marâtre, cherchant des réponses dans les profondeurs de son âme torturée.
Adjoa, prise au piège dans le regard implacable de son mari, sentit un frisson glacé lui parcourir l’échine. Ses pensées s’embrouillèrent dans un mélange de peur et de défi, mais elle tint bon, ses traits tirés par la colère et la résolution.
« Tu le sais aussi bien que moi, » répliqua-t-elle d’une voix tranchante, empreinte de défi et de mépris.
« Cet enfant est un fardeau pour nous tous. »
Les mots résonnèrent dans la pièce comme un coup de tonnerre, brisant le silence oppressant qui les avait enveloppés. Le père sentit une bouffée de rage monter en lui, mais il se força à rester calme, à garder le contrôle de ses émotions tumultueuses.
« Un fardeau ? » répéta-t-il d’une voix faible, mais chargée de désespoir. « Il est notre fils, notre chair et notre sang. Comment peux-tu dire cela ? »
La belle-mère leva les yeux au ciel avec dédain, ses lèvres tordues dans un sourire méprisant. « Il n’est pas mon fils, » cracha-t-elle avec mépris.
« Il est le fruit de ton infidélité, un rappel constant de ta trahison. »
Les paroles de cette dernière résonnèrent dans l’air comme un coup de poignard dans le cœur de Tadagbé, lui arrachant un gémissement de douleur. Il sentit le poids écrasant de la culpabilité peser sur ses épaules, une douleur lancinante qui lui transperçait l’âme.
Mais au milieu de la tourmente émotionnelle, une lueur d’espoir émergea dans le regard de ce dernier. Une détermination féroce brûlait dans ses yeux, alimentée par l’amour inébranlable qu’il portait à son fils bien-aimé.
« Peu importe ce que tu penses, » déclara-t-il d’une voix ferme, empreinte de résolution. « Il est mon fils, et je le protégerai de toi, de toutes les forces du mal. »
La marâtre éclata d’un rire amer, son visage tordu dans une expression de défi arrogant. « Tu ne peux rien contre moi, » cracha-t-elle avec mépris. « Je suis la maîtresse de cette maison, et tu ne peux rien faire pour m’arrêter. »
C’est alors que le père, la voix brisée par le chagrin, annonça d’une voix grave : « Il est mort. »
Un silence glacé tomba sur la pièce, brisé seulement par le bruit étouffé des sanglots de la marâtre. Son visage se décomposa sous le choc de cette révélation, ses yeux s’écarquillant d’horreur alors qu’elle réalisait l’étendue de ses actes cruels. Paniquée et désemparée, elle se mit à balbutier des excuses et des lamentations, mais les mots moururent sur ses lèvres alors qu’elle prenait conscience de la tragédie qu’elle avait provoquée.
Tadagbé resta là, debout devant elle, son regard empli d’une tristesse profonde et d’une détermination indomptable. Il la fixait avec une intensité qui semblait pénétrer au plus profond de son âme, l’accablant de la culpabilité de ses actes impitoyables.
Adjoa, submergée par un tourbillon d’émotions contradictoires, sentit le sol se dérober sous ses pieds. Elle se laissa tomber à genoux, les larmes inondant ses joues, son cœur brisé par le poids insupportable de sa propre cruauté.
« Je suis désolée, » sanglota-t-elle, ses mots étouffés par le remords et le chagrin. « Je ne voulais pas que cela arrive. »
Mais ses excuses sonnaient creux dans l’air chargé de tension et de douleur. Le père la regarda avec un mélange de dégoût et de pitié, sachant que rien ne pouvait effacer les dommages qu’elle avait causés, rien ne pouvait ramener leur fils bien-aimé à la vie.
Dans un silence pesant, Tadagbé se recula lentement, laissant sa femme s’effondrer sur le sol, submergée par le poids de ses propres actions. Son regard se durcit alors qu’il contemplait la scène devant lui, son esprit tourmenté par un tourbillon d’émotions contradictoires.
D’un côté, il ressentait une colère brûlante, un désir ardent de punir celle qui avait causé tant de souffrances à leur fils bien-aimé. Mais de l’autre, une voix intérieure le mettait en garde contre les conséquences dévastatrices d’un tel acte. Enfermer sa femme, la mère de ses enfants, risquait de détruire à jamais leur famille déjà fragile.
Pendant un moment, il resta là, pris au piège entre le désir de justice et la peur des répercussions sur ceux qu’il aimait. Mais finalement, une décision s’imposa à lui, pesante et inévitable. Il savait ce qu’il devait faire, aussi difficile que cela puisse être.
Avec un soupir résigné, il se tourna vers elle, son visage impassible cachant la tourmente qui grondait en lui. « Nous avons des choses à discuter, » déclara-t-il d’une voix calme mais empreinte de fermeté.
La belle-mère leva les yeux vers lui, son expression mêlée d’appréhension et d’incertitude. Elle savait que ce qui allait suivre ne serait pas facile, mais elle était prête à affronter les conséquences de ses actions, quelles qu’elles soient.
Le père lui tendit la main, l’aidant à se relever du sol froid et dur. Puis, sans un mot de plus, il l’entraîna avec précaution dans leur chambre à coucher, conscient du risque que les filles se réveillent et surprennent leur conversation. L’atmosphère était chargée de tension alors qu’ils franchissaient le seuil, se préparant à des conversations difficiles et à des décisions cruciales.
Dans l’obscurité de la chambre conjugale, alors que les ombres dansaient sur les murs et que le silence enveloppait tout, Tadagbé et Adjoa se retrouvèrent face à face, confrontés à un choix qui déterminerait le destin de leur famille pour les jours à venir.
Le regard du père était empreint d’une détermination sombre et impénétrable, tandis que celui de la belle-mère trahissait une anxiété palpable, mêlée d’une lueur d’espoir fragile.
Un lourd silence s’abattit sur la pièce, interrompu seulement par le battement sourd des cœurs battant dans la poitrine des deux protagonistes. Puis, d’un geste solennel, le père s’avança vers la marâtre, une lueur indéchiffrable dans ses yeux.
Soudain, le son strident du téléphone déchira le silence, brisant l’instant de tension palpable. Tadagbé se figea, le regard fixé sur l’appareil, hésitant entre répondre à l’appel et poursuivre la confrontation. Adjoa, quant à elle, détourna le regard, déglutissant avec difficulté alors que l’incertitude pesait lourdement sur ses épaules.
Et dans cette scène figée, alors que le destin de leur famille semblait suspendu à un fil fragile, une question brûlait dans l’air chargé de tension : quelle serait la décision du père ? Allait-il choisir la voie de la justice et de la rédemption, ou celle du silence et de la dissimulation ?
Mais pour l’instant, cette question demeurait sans réponse, flottant dans l’air comme un écho silencieux de l’incertitude qui enveloppait leur vie. Et tandis que le téléphone continuait de sonner, le père et la marâtre restèrent là, immobiles, chacun plongé dans ses propres pensées et ses propres doutes, se demandant quel chemin ils allaient emprunter, quel destin les attendait au tournant ?
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